La performance dont nous a gratifié Chris Froome ce vendredi est tout simplement extraordinaire. Un exploit hors du commun pour un personnage qui, pour diverses raisons, l'est au moins tout autant. Froome est donc parti à 80 kilomètres de l'arrivée, à mis tout le monde à l'amende, remporté l'étape en solitaire et rattrapé tout son retard pour au final endosser la tunique rose et mettre Dumoulin à quarante secondes... Aussi incroyable et surhumain que cela puisse paraître et à la surprise générale, Chris Froome est à deux doigts de remporter un Giro sur lequel il vient de poser une trace indélébile. Il vient indéniablement de marquer de son empreinte l'histoire du cyclisme, libre à chacun de lui donner la valeur qu'elle mérite, mais, quoiqu'il en soit, cette étape restera dans les annales.

Car, hormis cet incroyable fait d'arme, il va sans dire qu'on a vécu une course comme rarement on en a vécu une. Une fois le col de Lys passé, on a très vite retrouvé cette Sky dominatrice, que l'on aime tant détester, dans le col du Finestre et qui a directement imposé son train. Dès les premières pentes, c'est l'hécatombe et, c'est peu de le dire, Simon Yates a littéralement explosé sous les coups de butoirs de la machine anglaise. Il a très (trop) vite rendu les armes et termine, au final, à plus de quarante minutes du vainqueur. Domenico Pozzovivo, sans perdre autant de temps, l'a imité quelques centaines de mètres plus loin et trébuche d'un podium qui l'a tant et plus fait rêver pour se retrouver désormais sixième du général.

C'est la bérézina dans le peloton et les victimes collatérales sont innombrables. Chacun fait ce qu'il peut pour sauver ce qu'il y a encore moyen de sauver. La souffrance était plus que palpable et les seuls à avoir tirer leur épingle du jeu et à tenter de limiter les dégâts se comptent sur les doigts d'une main. Parmi eux, Dumoulin, Carapaz, Lopez et Pinot bien accompagné de son céleste ange gardien, Reichenbach. On ne va pas dire non plus qu'ils ont fait l'impossible pour revenir sur Froome, ils n'étaient que deux sur les cinq à rouler, mais leur duel fut hallucinant et épique jusqu'au bout. L'étonnant Carapaz parvient à s'adjuger la deuxième place à l'arrivée et Pinot, bien à la peine ces derniers jours pourtant, en termine troisième.

Le tour d'Italie vient une nouvelle fois de nous offrir un spectacle complètement dingue et nous prouve que la vérité d'un jour n'est jamais celle du lendemain sur les routes transalpines. Difficile de complètement s'extasier sur ce qu'il vient de se passer mais difficile également de ne pas s'emballer sur l'incroyable spectacle qui nous a été offert. Le classement général est complètement chamboulé et Dieu sait ce que nous réserve encore cette journée de samedi qui sera loin d'être juste une formalité. Le maillot rose a changé de main et la logique pourrait nous valoir de nouvelles surprises. Car après son improbable numéro, il serait légitime que Chris Froome, et d'autres encore, en paie les conséquences aujourd'hui.

Au Fantagiro, la donne a évidemment complètement changé aussi même si au général, il faudra encore un peu attendre pour détrôner ceux qui ont animé la Fantacourse depuis treize jours. A deux journées de la fin, ce n'est plus qu'une question de temps et la victoire d'étape de Macho Madness en annonce une bien plus belle encore à Rome ce dimanche. Team 60956 BLVE termine deuxième et se place, lui aussi, idéalement pour la dernière ligne droite tandis que Les Voleurs de Bicyclette est troisième. Et même s'il n'est que septième de l'étape, Torre Maresme1 est le troisième larron qui a su tirer les marrons d'un feu qu'on n'attendait pas si intense.

 

Le Bon Plan du jour

Que cette étape était belle ! Chapeau bas, car le spectacle offert était immanquable et le suspense d'une intensité rarement atteinte. Cyclisme d'un autre temps avec les routes non-asphaltées du col du Finestre et une ascension du Jafferau parmi les plus belles, on a vibré face à la beauté et à la difficulté de ce qui restera une des plus magnifiques étapes qu'il nous ait été donner de voir. Laissons les polémiques de côté pour ne retenir que la beauté de ce qu'il vient d'arriver et savourer avec délectation cet improbable et fantastique retournement de situation.

Quant au bon plan fantacycliste, le prix du jour revient à Superman Lopez. Parmi les leaders à coût élevé, Miguel Angel Lopez était le seul qui n’avait pas encore basculé d’un coté ou de l’autre de la balance fantacycliste. Malgré son maillot blanc, il n’avait pas encore rapporté beaucoup de points, en tous les cas moins que ce que pouvaient espérer les 82 fantateams ayant misé sans se poser trop de questions sur Superman. En prenant, difficilement, il faut le dire, le bon wagon dans le Colle elle Finestre, Lopez s’est assuré une place dans le top-5 final. Le maillot blanc n’est pas encore garanti, mais une place sur le podium est également encore possible. Il passera la barre des 1000 points et avec la nouvelle situation au Fantagiro et la disparition de Yates du classement général, il sera probablement un des hommes qui feront la différence. 

 

Le Mauvais Plan du jour

Il est rare, voire même inexistant, de voir un maillot rose sombrer comme Simon Yates l'a fait ce vendredi. On ne lui enlèvera pas ses deux magnifiques premières semaines de course mais ce naufrage n'avait rien de forcément annoncé et nous laisse un tant soit peu sur notre faim. Certes, Yates a beaucoup donné, trop sans doute, et on s'attendait à ce que le britannique, déjà victime d'une alerte, soit quelque peu à la peine et doive donner tout ce qu'il avait pour rester leader. Mais là, la faillite est collective chez Mitchelton et, au-delà de la seule dérive de Yates, c'est toute l'équipe qui nous a déçu en cette fin de Giro. Dominateurs en diable depuis 2 semaines, l'équipe toute entière s'est bel et bien écroulée de manière assez surprenante. Avec Nieve, Haig, Chavès et Kreuziger, les australiens avaient tout pour parvenir à leurs fins mais il n'en sera finalement rien... L'objectif de placer un des leurs sur le podium s'est définitivement envolé mais, merci messieurs, vous nous avez offert deux semaines de pur plaisir.

En ce qui concerne le mauvais plan mathématique, on a attendu un ^peu de voir s'il pouvait sauver son Giro, mais là, on ne peut plus le nier. Woet Poels pouvait être une bonne alternative en cas de défaillance de Chris Froome, ou même en cas de super-domination de la Team Sky. Même si on en a été proche, aucune de ces deux situations ne s’est présentée et Poels n’a jamais vraiment trouvé sa place dans ce Giro. Après avoir perdu beaucoup de temps dans les deux premières semaines, il est monté en puissance, avec une prestation impressionnante dans le Zoncolan et surtout, une troisième semaine où il a montré tous les jours qu’il avait des super jambes. Mais pour une raison ou pour une autre, ça n’a rien donné et le Néerlandais s’est contenté d’offrir deux 15ème places aux 11 fantateams qui auraient franchement mieux fait de prendre Pozzovivo… Vendredi, Poels se sentait à l’étroit dans le troisième groupe. Il a tenté d’en sortir pour revenir sur Dumoulin et Pinot, mais il avait trop tardé et l’écart était déjà important. Il est donc sagement resté dans les roues de tous ces coureurs qui sont devant lui au général et lorsqu’il a appris que son leader était le nouveau maillot rose, il a fait une montée du Jafferau peinard avec Henao, histoire de garder des forces pour défendre le maillot le dernier jour. Mauvais plan certifié.