Le maillot de l'équipe Castorama est reconnaissable parmi milles. Avec sa salopette dessinée sur la tunique aux couleurs bleu-blanc-jaune, il fait partie des maillots de légende de l'histoire du cyclisme. Retour sur une équipe qui a représenté le dernier chapitre à succès de la carrière d'un grand bonhomme du cyclisme des années ´80.  

La carrière de directeur sportif de Cyrille Guimard a été longue et remplie de succès, de défaites et de grands moments de cyclisme. Des premières victoires de Bernard Hinault avec l'équipe Gitane jusqu'à la déception du Tour perdu par Laurent Fignon pour 8 secondes sous les couleurs de Super U, en passant par la formidable époque Renault, Guimard en vu des coups de pédale. Il a non seulement un palmarès incroyable, mais a aussi contribué au renouveau du cyclisme et à sa modernisation, notamment en ce qui concerne les relations entre coureurs et structures sportives.

En 1985, suite au retrait de la régie Renault du peloton et du monde du Sport en général, Guimard et Fignon créent la formation France Competition qui au lieu de suivre le modèle ancien datant de l'après-guerre, permet à la structure sportive de s'émanciper du sponsor-employeur. Au lieu de dépendre directement du sponsor, la nouvelle formation vend l'espace publicitaire au plus offrant et gère son budget comme elle l'entend. Ce système révolutionnaire pour l'époque fut copié par de nombreuses formations et est d'ailleurs encore en vigeur aujourd'hui. Les supermarchés Systeme U furent les premiers à financer l'équipe de Guimard et Fignon, mais après plusieurs années de succès, ils decident d'abandonner le sponsoring au terme de la saison 1989. Guimard et Fignon réussissent non sans mal a trouver un nouveau sponsor et c'est ainsi que les magasins d'outillage Castorama font leur entrée dans le peloton au début de la saison 1990 avec ce maillot tellement caractéristique.

Les coureurs qui débutent la saison 1990 avec le maillot Castorama sont sensiblement les mêmes qui ont terminé la saison précédente sous les couleurs de Super U. Laurent Fignon est le leader historique, mais après le traumatisme du Tour '89 perdu à la dernière étape, il ne retrouvera plus le niveau qui lui avait permis de remporter trois grands tours dans les années '80. Il supporte mal que son ami Guimard privilégie les jeunes talents comme Luc Leblanc et le Tour 1991, où Leblanc endosse le maillot jaune pendant quelques jours, marquera la rupture définitive entre les deux hommes. Fignon ne laissera pas vraiment son empreinte sur l'histoire de Castorama qu'il quittera d'ailleurs après deux saisons pour rejoindre la team Gatorade, avec le Criterium International de 1990 comme unique succès majeur. 

Le coureur symbol de l'époque Castorama, c'est plutôt Thierry Marie. Ancien pistard, blond aux yeux bleu d'acier, Thierry Marie est un coureur atypique qui a su jouer sur ses points forts tout en s'adaptant au fil de sa carrière. Au début des années ´90 Thierry Marie est le grand spécialiste des prologues. Il est presque imbattable sur les contre-la-montre de courte distance, ce qui lui permet d'endosser le maillot jaune au début des Tours 1991 et 1992 et le maillot rose du Giro 1992. Bizarrement, Marie a remporté très peux de contre-la-montres plus longs au cours de sa carrière, mais lorsqu'il s'agissait de prologues, il était tout simplement le meilleur. Au Fantacycling, Thierry Marie aurait été un bon plan garanti à chaque tour commençant par un prologue...  En 1991, il réalise l'exploit de remporter le prologue de Paris-Nice, du GP Midi Libre, du Criterium du Dauphiné et du Tour de France. Cette annee, àprès avoir rapidement cédé son maillot jaune, il le récupère lors de la sixième étape entre Arras et Le Havre, où il s'impose après 234 kilomètres d'échappée solitaire. Cet exploit reste encore aujourd'hui la deuxième plus longue échappée solitaire et victorieuse de l'histoire du Tour.

Les attaques de loin et les longues échappées ont d'ailleurs toujours plu à Guimard. En 1992, c'est Jacky Durand qui réalise un énorme numéro en remportant le Tour des Flandres après avoir attaqué à 217 kilomètres de l’arrivée. Guimard remporte enfin cette course que même Hinault et Fignon n'avaient pas réussi à dompter. Quand à Durand, cette victoire le propulse sur le devant de la scène à 25 ans et il reste à ce jour le dernier français à avoir remporté le Ronde.

Durand rempotera aussi deux etapes du Tour, dont le prologue de 1995, et deux titres de champion de France en 1993 et 1994. Il sera un des nombreux jeunes français à être passé par l'équipe Castorama dans la première partie des années '90. Certains remportèrent des courses importantes, comme Luc Leblanc, Dominique Arnould ou Armand De las Cuevas. D'autres, comme Thierry Bourguignon, Gilles Delion, Yvon Ledanois, Laurent Maduas, François Simon, Jean-Cyril Robin ou le grand Gérard Rué, seront plus connus pour avoir animé un grand nombre d'étapes de la Grande Boucle à une époque où le cyclisme français était au plus bas. A cause d'une absence de talents, certes, mais aussi parce qu'il mit plus de temps à s'adapter aux pratiques de dopage en vigueur dans les autres pays. Toujours est-il que les coureurs de Castorama ont contribué à la création du mythe du baroudeur français, toujours à l'attaque pour montrer le maillot sur le Tour, mais rarement gagnant.

Castorama décida de se retirer du peloton professionnel au terme de la saison 1995. Fatigué et dépassé par un cyclisme dans lequel il ne se reconnaissait plus, Guimard mettra un terme à une formation qui aura vécu dix ans. Il restera dans le monde du cyclisme en acceptant un rôle de directeur sportif chez Cofidis en 1997, mais cette expérience ne durera qu'une saison. Puis, en s'occupant de la petite structure Roubaix Lille Métropole à partir de 2007. Aujourd'hui, après une courte expérience de sélectionneur de l'équipe nationale de France de cyclisme sur route, il se contente d'un rôle de consultant pour les radios ou les sites spécialisés.

La fin de l'équipe Castorama marqua la conclusion du projet de Guimard tel qu'il l'avait conçu. Un projet qui en un quart de siècle aura permis de lancer un grand nombre de jeunes coureurs français, des champions, des talents incomplets, des gregarios et surtout des baroudeurs.