Fabio Aru a réussi son pari. Il a quasi la Vuelta 2015 dans la poche après une étape exceptionnelle, gérée de manière parfaite par le sarde et son équipe. Sans équipiers pour l’épauler, Tom Dumoulin s’écroule et sort du podium. Un podium sur lequel figurera Joaquim Rodriguez qui a été attaqué par Quintana et Majka mais qui a réussi à sauver sa deuxième place pour quelques secondes. L’étape du jour a été remportée par Ruben Plaza, alors qu’à la Fantavuelta, The King a poursuivi son festival cannibalesque, puisqu’il place ses poulains aux trois premières places du général. Aru, the nouveau King d’Espagne.

Si quelqu’un avait encore un doute sur le fait que le cyclisme est un sport d’équipe, nous lui conseillons vivement de regarder la 20ème étape de la Vuelta 2015 entre San Lorenzo de El Escoril et Cercedilla. Le moment clef : le groupe maillot rouge aborde le Puerto de La Morcuera, la troisième et avant dernière difficulté du jour. Plus tôt, une très large échappée matinale s’était formée avec de nombreux coureurs de toutes les équipes, dont Luis Leon Sanchez et Andrey Zeits de l’équipe Astana. Ce col est le plus difficile du jour, avec les pourcentages les plus élevés. L’Astana impose un rythme dur qui a esseulé le maillot rouge Tom Doumoulin. Une première accélération de Mikel Landa créé un trou. Le maillot rouge est lâché mais revient petit à petit, à son rythme. Il sait qu’il doit terminer l’étape dans la roue de Fabio Aru s’il veut garder ses six secondes d’avance et remporter une victoire finale inespérée. Le sarde sent quant à lui que Dumoulin est prenable aujourd’hui. Il place une accélération peu après. Une des siennes, celles où il se met en danseuse en imitant le style de son modèle Alberto Contador. Seuls Nairo Quintana et Rafal Majka peuvent le suivre. Tom Dumoulin ne panique pas, il poursuit à son rythme. Il sait que le sommet n’est pas loin. Les choses changent lorsque Joaquim Rodriguez, Esteban Chaves et Mikel Landa accélèrent à leur tour et lâchent Dumoulin pour rejoindre le groupe Aru. Dumoulin se retrouve seul, enfin avec Mikel Nieve comme unique compagnon. Il n’a que 15 secondes de retard sur Aru au sommet du col et se lance à toute allure dans la descente. Une descente rapide et roulante qui convient parfaitement à ses caractéristiques. Il voit le groupe des leaders au bout de la ligne droite, il n’a probablement que 5-6 secondes de retard. Encore un effort et le tour est joué. Le dernier col est moins difficile, les pentes ne dépassent pas le 8,5%. Ce sera plus facile de s’accrocher. Mais là, un moment d’hésitation, Dumoulin demande un relais à Nieve. Au même moment, Andrey Zeits et Luis Leon Sanchez qui avaient attendu le groupe Aru, se joignent à leur leader. Quatre Astana contre un Dumoulin. On a beau être un des meilleurs rouleurs du peloton, c’est une mission impossible. Le retard augmente à nouveau. 10 secondes, 20, 30, une minute. La résignation qui s’installe petit à petit. Au final, Dumoulin perdra près de quatre minutes. Il perd la Vuelta, il perd sa place sur le podium. Si seulement il était rentré sur Aru avant que le sarde ne puisse bénéficier de l’aide de ses deux co-équipiers. Si seulement il avait eu un camarade à ses cotés. L’étape de samedi ne remet en rien en cause l’exceptionnel Tour d’Espagne réalisé par Tom Dumoulin, par contre, elle montre bien qu’on ne gagne plus un tour de trois semaines sans une équipe solide à sa disposition.

Avec tout ça, on oublierait presque que Majka et Quintana ont failli infliger une nouvelle journée-de merde-où-on-perd-tout à Joaquim Rodriguez, mais l’Espagnol a défendu sa deuxième place de justesse, grâce aussi à l’aide des Astana. On oublierait presque aussi de mentionner que Ruben Plaza a remporté sa deuxième étape d’un grand tour cette année après une carrière de plus de dix ans sans grands succès. Il s’impose avec plus d’une minute d’avance au terme d’une chevauchée solitaire de 120 kilomètres. Une chevauchée qu’on ne voyait plus depuis les temps de Richard Virenque et du Docteur Fuentes… Pour couronner le tout, cette étape historique a permis au nouveau roi du fantacyclisme de placer trois coureurs sur le podium final de la Vuelta. Et tant pis si Valverde a passé une mauvaise journée et recule à la septième place, l’étape de Madrid sera une longue passerelle pour saluer son fantamaillot rouge. La Fantavuelta est dans la poche pour The King. Par contre, derrière El Rey, la bagarre fait rage. Les deux teams de Nima se retrouvent enfin sur le podium. Mais la dernière place du top-3 est loin d’être acquise. La 21ème étape et son sprint annoncé pourraient bien être décisive, tellement les écarts risquent d’être serrées entre Torero, Tormenta, Caja Rural tu perd ton sang froid, Les cyclistes volants, El Diablo et Gitane Col.