La première arrivée en montagne du Giro a bouleversé la course beaucoup plus que prévu. Des leaders qui chutent, des leaders qui craquent, d’autres qui sombrent, une échappée qui va au bout, un nouveau maillot rose dans la même seconde que le vainqueur du jour, des équipes surprises et complètement désorganisées. Un vrai carnage, difficile à résumer en quelques lignes. Tout avait commencé avant le départ réel, lorsque Geraint Thomas a roulé sur un bidon dans les rues d’Enna, suivi d’une chute violente qui laissera des traces. Souffrant à la jambe gauche, Thomas a commencé à perdre contact avec le peloton à 45 kilomètres de l’arrivée. Il est rentré avec l’aide du maillot rose, Filippo Ganna, mais pas pour longtemps. La suite n’est qu’une longue agonie qui se terminera avec plus de 12 minutes perdues sur le vainqueur du jour. Un vainqueur du jour qui faisait partie de l’échappée matinale qui avait été contrôlée par l’équipe Mitchelton Scott pendant toute la journée. Un travail en vue de l’attaque de leur leader Simon Yates, le grand favori du jour. Mais le Britannique était loin d’être le grimpeur intouchable qu’on a vu sur Tirreno-Adriatico. Il a perdu contact avec le groupe des meilleurs dès les premières pentes difficiles de l’Etna. Grâce à Jack Haig, il limite la casse, mais perd quand même 3’30 sur les autres favoris.

Ces défaillances ont surpris tout le monde et l’absence des scénarios attendus a pendant longtemps semé la pagaille dans le groupes des leaders, ou du moins de ce qu’il en restait. Une pagaille qui a fait les affaires des deux derniers rescapés de l’échappé matinale, Jonathan Caicedo et Giovanni Visconti. Avec 3 minutes d’avance aux pieds de la montée finale, leurs chances d’aboutir étaient minimes. Mais l’absence d’organisation dans le peloton leur a permis de se disputer la victoire d’étape, avec Caicedo qui s’est envolé à 4 kilomètres de l’arrivée, laissant le régional de l’étape Visconti avec une deuxième place douce-amère.  Derrière eux, les enjeux étaient multiples. De la lutte pour le maillot rose du jour, à celle entre favoris survivants, en passant par la résurrection de Pozzovivo ou de Kruijswijk. Mais le tout dans un joyeux bordel. On ne va pas jusqu’à regretter les trains des Sky ou des Jumbo-Visma, mais un minimum de travail d’équipe, quand même. A part Brambilla qui a travaillé pour Nibali autant qu’il le pouvait, aucun équipier n’a fait un effort pour son leader. Almedia avait le maillot rose à portée de main, il n’a eu aucun soutien de la part de Knox et Masnada qui s’accrochaient à quelques secondes de lui. Il a dû aller le chercher seul, en donnant tout ce qu’il avait, même s’il n’a pas été capable de suivre Nibali, Fuglsang & Co. Les Bahrein Pernsteiner et Bilbao ont joué leur carte perso, sans succès. Konrad était là pour Majka, mais lui aussi n’a pas mis un coup de pédale tout en s’efforçant de rester accroché au groupe. Si Yates n’a pas perdu plus de temps et reste encore (de loin) dans la course, c’est aussi à cause de l’absence d’équipiers efficaces et dévouées. Wilco Kelderman a bien compris qu’il y avait un coup à jouer et a placé une attaque au bon moment. Mais peut-être que s’il avait fait travailler son équipier Hindley, il aurait pu aller chercher plus qu’une quatrième place. Il prend malgré tout quelques secondes aux autres leaders, ce qui ne changent pas grand-chose, mais qui fait du bien au moral. On notera aussi la surprenante troisième place du jeune Harm Vanhoecke qui se place deuxième du classement des jeunes et on ne s'attardera pas sur les autres semi-déceptions du jour, de Sam Oomen à Carl Frederik Hagen, en passant par Tanel Kangert, Ben O’Connor, Tao Geoghegan ou Ruben Guerrero. Toujours est-il que ce soir, Joao Almeida est en rose et blanc, Caicedo en bleu, Ulissi toujours en cyclamen, alors que Nibali et Fuglsang doivent plutôt être content de leur journée.

La folie sur les routes semble se propager aussi au Fantagiro. La question du jour devait s’interroger sur les sensations que doivent vivre les fantamanagers qui voyaient avec certitude Yates et Thomas sur le podium à Milan, peut-être accompagnés de Vlasov, avec Miguel Angel Lopez comme roi de la montagne… En fait, un d’entre eux doit se sentir pas mal, puisque le vainqueur du jour Jeff Copé s’impose avec une team composée de Thomas, Simon Yates, Vlasov… Almeida et Caicedo. Du grand écart dans toute sa splendeur… PyllRivaldo reste en tête du général, mais les écarts sont minimes et comme on a vu aujourd’hui, tout peut encore arriver.

Le bon plan du jour

Jonathan Caicedo faisait partie de ces innombrables coureurs coûtant entre 10 et 15 fantamillions qui pouvaient tirer leur épingle du jeu dans un Giro qui devait sourire aux baroudeurs. Vainqueur d’étape, deuxième du général, maillot bleu avec une large avance sur le deuxième… 3 fantateams se frottent les mains.

 

Le mauvais plan du tour

Geraint Thomas a clairement manqué de chance et ce n’est pas la première fois. Après sa performance au contre-la-montre de Palerme, il semblait être l’homme à battre, mais c’était sans compter ses difficultés chroniques à rester en selle. Un bidon sur la route et le Giro est fini. Reste à savoir si le Gallois restera en course pour tenter de sauver sa saison avec une victoire d’étape ou plus. Mais vu son passé, notamment au Giro, on a quelques doutes sur ses capacités à souffrir pour rebondir.

 

La question du jour

Passons à autre chose après tant d'émotions, avec une étape tranquille et un premier sprint massif... enfin, pas si sûr que ça, car la question du jour est de savoir si les sprinters comme Gaviria, Viviani ou Démare vont passer le col de troisième catégorie situé à mi parcours à une distance raisonnable des meilleurs. Un col pas très difficile mais qui mesure quant même 16 kilomètres et il ne manquera que 65 kilomètres au sommet. Autant dire que cette étape nous réserve peut-être encore quelques belles émotions.

 

Comments

Personnellement j'ai apprécié l'étape, c'était n'importe quoi, mais justement ça change. Par contre, les équipes sont vraiment faibles. Même les Trek de Nibali n'ont pas grand monde. Le maillot rose chez Quick Step ça doit bien arranger les autres équipes.